Histoire
Histoire de Taboudoucht
L'histoire du village de Taboudoucht reste à écrire et il appartient à ses enfants de le faire tant qu'il est encore possible de recueillir les témoignages de nos ainés. Il est vrai que l'écriture de l'histoire est une affaire de spécialistes, mais il n'en demeure pas moins que la collecte des témoignages est l’affaire de tous.
Un projet de réalisation d’un Film Documentaire sur Le Village TABOUDOUCHT et ses environs (AZEFFOUNE Tizi-Ouzou) a été initié par comité de village en collaboration avec l’association « M’HAMMED ISSIAKHEM » et un projet de demande de sponsoring de cet ambitieux projet a été élaboré. Nous vous livrons ci-après le contenu du document élaboré par le Comité de village.
TABOUDOUCHT est un village de la Kabylie maritime. Tout comme la majorité des villages Kabyles, TABOUDOUCHT recèle des trésors de traditions, de culture, d’histoire et de valeurs qui restent soit cachés ou négligés. La culture Kabyle en particulier et Algérienne en générale reste malheureusement dans le stade oral. Les données historiques, identitaires et traditionnelles se transmettent de génération en génération à travers la voie orale, et ce depuis plus de 2000 ans.
Fort est de constaté que notre génération actuelle maitrise faiblement cette culture de garder en mémoire les données léguées par nos parents. C’est ainsi que ladite génération risque fort de perdre un héritage inestimable de notre esprit de tradition et d’histoire.
Or la génération actuelle a un atout très efficace du fait que le sacrifice de nos parents nous ont permis de côtoyer l’école, devenir ainsi lettré pour canaliser, recenser, sauvegarder et valoriser notre identité sur divers plans.
C’est dans le cadre de faire sortir de l’anonymat et de voler au secours de l’histoire que nous souhaitons, la réalisation d’un film documentaire sur le village TABOUDOUCHT.
Pour ce faire une équipe très expérimentée est prête à se déployer avec la vive contribution du comité de village TABOUDOUCHT et l’association M’HAMMED ISSIAKHEM.
Le village sera analysé sous tous ses aspects. Le film traitera au moins une dizaine de chapitre. De l’histoire antique qui remonte à plus de 2000 ans, les origines du village en passant par la glorieuse Révolution Nationale, jusqu’à la vie et l’organisation de tous les jours de la génération actuelle.
Le documentaire sera réalisé en deux langues, Français et Tamazight. Sa durée variera entre 52 à 60 mn. En plus de la durée de ces films, en réalité sur le terrain plusieurs heures de tournage et de recueils de témoignages seront réalisées. En plus du film en lui-même, toutes les données collectées soient transmises aux responsables du village pour qu’elles soient sauvegardées comme une véritable banque de données et de mémoire collective de TABOUDOUCHT.
Pourquoi ce documentaire :
Chaque jour qui passe, nous perdons un de nos parents. Chaque départ de cette ancienne génération est une bibliothèque qui se brule de notre histoire et de notre mémoire collective. C’est dans ce sens qu’il faudra opérer un sursaut d’orgueil et venir au secours de notre histoire avant que ce ne soit trop tard.
Egalement ce film sera une véritable référence pédagogique. Il constituera ainsi une véritable carte de visite du village TABOUDOUCHT, et sera sans doute la fierté et un élément qui va contribuer à créer plus d’union et d’entraide et de fraternité entre les enfants de ce paisible village de la Kabylie Maritime.
Nous allons également garantir une large diffusion de ce documentaire dans différents médias audiovisuels à l’exemple de la chaîne méditerranéenne, Berbère Télévision, TV4 et NUMIDIA News
Petit aperçu historique sur Taboudoucht (Contribution de Cherif Ouabbou)
Si on ne connaît pas la date exacte de la formation du village, la plupart des historiens situent entre dix à douze siècles après la chute de la domination romaine la formation de la tribu des Ath Djennad.
A l’arrivée de Sidi Hand Braham au douzième siècle, Taboudoucht était un petit hameau. Suite à l'accueil qu'il lui a été réservé, il décide de s’installer avec sa petite famille (sa femme, ses enfants et son frère) et y fonda une petite zaouïa.
Les gens venaient d'un peu partout, des hameaux des environs et même de plus loin comme Tifrit Nait El Hadj. Les uns pour des études et d'autres pour y trouver du travail.
Les premiers qui se sont joints au village sont les Aït Kaci suite à un problème avec les Izrakhfawen.
Un peu plus loin exactement à Si Moh Wamara il y avait un autre village beaucoup plus grand (Ichkaven) ses habitants sont connus comme de farouches guerriers.
Après la mort de Sidi Hand Braham qui a été enterré dans un lieu selon sa volonté loin de l'ancien cimetière de Tikharouvin, le village de Taboudoucht est divisé en deux les enfants du saint et quelques fidèles (Lakhwan) ont choisi de fonder juste à côté de sa tombe le village de Houbelli ainsi donc à la fin du douzième siècle il y avait trois villages selon plusieurs sources. Taboudoucht, Ichkaven et Houbelli.
Pendant la colonisation turque qui n’a jamais pu soumettre cette région les trois villages faisaient partie du Aarch Ath Djennad Labhar.
Après la chute de la résistance kabyle de 1857 les villages ont perdu beaucoup d'hommes des familles entières ont été décimées. Le village d’Ichkaven a perdu plus de la moitié de ses habitants. Selon certaines sources le nombre de vivants a été tellement réduit qu'une réunion des familles a eu lieu pour discuter de l'avenir du village surtout qu'il y'a eu la mort de plusieurs bébés sans aucune explication (1867). Il fallait choisir entre aller habiter à côté de Houbelli où de Taboudoucht. Impossible de trouver un consensus. Les membres du village ont été divisés en deux groupes par l’Amin. Un devant aller s’installer à côté de Houbelli qui a donné naissance par la suite au village d’Iziriwen alors que l'autre s'est rapproché du village de Taboudoucht qui est devenu actuellement Adrum Ichkaven.
Nador par contre été un poste d'observation du village de Taboudoucht et au même temps (Laaziv) Boubaker et Nador sont des frères du village de Taboudoucht. La révolte de 1871 a fragilisé encore plus le village de Taboudoucht (Taboudoucht et Ichkaven). Des familles entières ont été exterminées, à l’image des Ath Titou, Ath Chikh, Ath El Vadjah, Ath El Ghoul etc.
D'autres familles ont choisi de quitter le village comme cela a été le cas d’Ibirghen et Taboudoucht.
La misère s'est installée. On raconte que des gens sont partis à pied jusqu'à Bordj Bouarraridj pour chercher de la nourriture qui a été partagée par la suite équitablement avec la chechia de l’Amin du village.
Organisation socio-politique de la Kabylie avant et après 1857
Afin de vous permettre de mieux comprendre l’organisation des villages kabyles et de mieux saisir le sens des termes : Axxam, Taxarubt, Adrum et Taddart, nous publions un extrait d’une contribution signée Ramdane Lasheb, publiée dans le journal Liberte du 08 novembre 2006.
Tous les villages se ressemblent dans leurs structures et dans leurs situations géographiques et l’étude d’un seul, suffit pour comprendre toute l’organisation sociale et politique des communautés villageoises.
L’unité sociopolitique et économique de base de la société Kabyle est la famille élargie : Axxam.
1) Axxam :
Il est composé de grands-parents, du père, de la mère et de leurs enfants. Trois générations vivent ensemble sous l’autorité de amghar (le vieux). Il est le porte-parole de la famille, notamment à la djemaa (tajmat).
Un ensemble de familles (ixxamen) ayant un ancêtre commun compose Taxarubt ou adrum dans certains cas.
2)Taxarubt :
Taxarubt (fraction), est l’extension de la famille élargie. Elle occupe un espace bien défini. Taxarubt "est l’unité première de référence idéologique. L’ensemble des unités composant Taxarubt partage en commun l’héritage symbolique légué par l’ancêtre en lignée paternelle. Elles sont collectivement comptables de l’intégrité physique de chacun des membres les composant, et de l’honneur du nom partagé en commun." Avant l’introduction du nom patronymique par l’administration coloniale, les membres de taxarubt (fraction) s’identifient à son nom. Elle porte le nom de l’ancêtre.
Exemple : Mezyan n Ath Ali (ath Ali est le nom de Taxxarubt).
Un ensemble de tixarubin (fractions) compose adrum (le quartier). Cependant, imsenden ou Ibaraniyen (familles étrangères) qui se trouvent dans le village, s’insèrent dans les différentes fractions.
3) Adrum (quartier) :
Dans les grandes communautés villageoises, le quartier marque une limite géographique. Ainsi, "la structuration qui va de l’axxam à adrum se trouve projetée dans l’agencement des habitations, des tombes au cimetière et jardins". Un ensemble de iderma (quartiers) forme taddart (le village).
Il arrive que, pour se défendre ou pour attaquer un ennemi commun, des villages s’unissent et forment laârc (tribu) : "Des tribus se liguant contre l’ennemi commun, les confédérations des Flisas, des Guechtoulas, des Aït-jenad, et des Ait Iraten prirent les armes et engagèrent la lutte, en commun, contre les autorités locales que les deys d’Alger cherchaient à leur imposer." Pour les mêmes raisons, les tribus se confédèrent et forment Laârac ou taqbilt (confédération de tribus). Elles sont dissoutes dès que les mêmes conditions qui les ont fait naître cessent d’exister.
Par ordre croissant on obtient :
Axxam (famille), taxarubt (fraction), adrum (quartier), taddart (village), laârc (tribu), taqbilt (confédération de tribus)
4) Taddart :
Taddart (communauté villageoise) se présente comme une petite république.
Taddart (village) qui vient du mot dder (vivre) signifie lieu de vie. "Le village représente le monde des vivants, le monde social, doté d’une organisation socio-économique et politique afin d’assurer sa reproduction physique et sociale". Taddart est administrée par une autorité dirigeante qui est tajmaât (assemblée du village). Elle est composée de “lamin”, assisté par des temans (représentants des différentes xarubas), d’un oukil (trésorier) et d’un imam (secrétaire).
Avant la colonisation française, tajmaât était un véritable conseil politique doté d’un droit coutumier et de toute indépendance. Elle gère les affaires de la communauté : guerre, paix, promulgation des lois ou leur annulation … Ils exécutent les décisions de l’assemblée, ils veillent sur le patrimoine et les intérêts généraux du village.
Après la colonisation, tajmaât n’a plus les mêmes prérogatives d’avant, elle est remplacée d’abord par celle du douar (une seule pour toute la tribu). Elle est dirigée par un corps composé d’un bachagha, d’un caïd et de notables choisis et nommés par l’administration. Ensuite, ce conseil est devenu l’assemblée communale qu’on connaît de nos jours. La dilution de tajmaât n taddart (conseil du village) dans celle du douar ne peut trouver explication que dans la volonté d’avoir la mainmise sur la Kabylie frondeuse. Malgré cela, les communautés villageoises continuent de nos jours de débattre et régler certains problèmes de la communauté. Ainsi, les jeunes de la communauté villageoise qui se sont révoltés en 2001 contre le pouvoir central, pour se défendre et faire aboutir leurs revendications, ont activé le système d’organisation traditionnelle. Ils se sont organisés en laârac (en confédérations).
Commentaires
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- 1. Yahiaoui Le 24/08/2023
Je vois qu'il y avait un projet pour produire un film documentaire sur Taboudoucht et je suis curieux de savoir si le projet est toujours en cours. Thanemirt. -
- 2. Ouabou lies Le 08/07/2017
Merci pour toute ces informations moi je suis le fils de Khelfa et Amar mon grand père. Merci bon continuation -
- 3. Cherif Ouabbou Le 18/02/2017
Merci Omar pour le commentaire et moi je souhaite un grand débat sur l'histoire de notre village.
Dieu seul sait combien de fois que j'ai visité
Si moh ouamara et même un peu plus loin
Que tala oumalou mais moi je ne suis pas un historien ni un archéologue,bien sur il y'a beaucoup de coin qui méritent d'être fouiller.
Pour le déplacement de si moh ouamara ar lahouari à côté n adghagh n'tsekourin puis
à côté ninourar le lieu actuel de adrum n ichkaben moi j'ai eu plusieurs versions
De trois personnes de adrum n ichkaben.
Une vieille qui habitait juste devant votre maison et deux hommes ,malheureusement ils ne sont plus de ce monde et à chaque fois que quelqu'un meurt une bibliothèque qu'il emporte avec lui.
Moi aussi ma mémoire commence à me trahir.
J'ai fait une comparaison des trois versions et
J'ai pris en considération la situation du village dans les mémoires du maréchal randon juste avant la destruction de la kabylie en 1857.
Donc le déplacement est entre 1860 et 1870.
Il y'a un autre fait qui est arrivé à mon oreille
Pendant mon enfance la misère de 1866 à 1867
Qui a frappé toute la kabylie et la vieille à située le déplacement entre 1857 et 1871.
Cherif ouabbou -
- 4. omar Le 16/02/2017
Merci Cherif pour cette intéressante contribution!
Je pense qu’avec des contributions pareilles, on mettra un jour un terme à la culture orale qui a laissé beaucoup de séquelles…
Effectivement, en partie se sont des fragments de notre histoire qui me sont aussi parvenus par le biais de nos aînés. Malheureusement je n’ai trouvé aucune référence.
Je voudrais faire deux commentaires:
1. Il me semble que la date de 1867 (naissance des deux villages, Ichkavene et Iziriwene) est plus loin que ça.
2. Il y a aussi la raison de la naissance des deux villages, Ichkavene et Iziriwene, d’après mes informations (la source c’est toujours nos aînés), c’était un glissement de terrain à Si Moh Wamara qui avait obligé le village à se déplacer en se scindant en deux, faute de consensus.
Je voudrais aussi ajouter une information aux citoyens, MELLAH Youcef détient des objets de valeur archéologique, il les a exposé à plusieurs reprises dans des manifestations culturelles à l’échelle de la wilaya. En faisant ses recherches sur le site de Si Moh Wamara (où des ruines de maisons existent toujours), il a trouvé des écritures indéchiffrables sur une pierre. Hend SADI, qui s’intéresse à tous ce qui est archéologie, pense que c’est une écriture punique. À l’époque, il nous a promis de faire des recherches approfondis sur cette écriture, malheureusement aucune suite, personne n’a cherché après lui pour voir s’il a obtenu quelque chose de concret.
Pour conclure, je me demande est-ce qu’il y a un moyen de récupérer la pierre et la mettre dans un endroit plus sûr. certes la pierre est trop lourde pour la faire déplacer, mais peut être il y a un moyen de couper juste la partie où il y a l’écriture.
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